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11/10/2010

TRAVAIL SALARIE ET CAPITAL : IDEOLOGIE ET PRAXIS.

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Editorial du numéro 44 de la revue Rébellion ( disponible prochainement) 

Il y aurait actuellement, en France, un "débat" sur les retraites. La bourgeoisie affectionne ce terme, un peu moins sa réalité. De débat, il n'y en eut guère, du moins avec ceux qui sont directement concernés : les salariés. Il y eut quelques dialogues médiatiques entre des représentants de la majorité parlementaire et son opposition, histoire de faire tourner la boutique à illusions. Par ailleurs, il est bien connu qu'en France, il n'existe pas suffisamment de "dialogue social". Mais pour parler de quoi? Du dialogue social à la collaboration de classe, il n'y a qu'un pas ; pas que devrait franchir le prolétariat afin d'acquiescer à son dépeçage. La classe dominante ne connaît que les rapports de force, sur ce point elle a, d'ailleurs, raison. C'est à ceux qui pâtissent de cette situation - la grande majorité de la société - de le comprendre. A cet égard, le poids de l'idéologie n'est pas accessoire ni contingent. Pour l'oligarchie capitaliste au pouvoir le calcul serait simple, relevant de l'arithmétique élémentaire. La retraite par répartition serait en mauvaise posture car les prolétaires ne travaillent pas assez longtemps afin de pouvoir payer les retraités futurs, les actifs finançant les inactifs. La décision gouvernementale relèverait d'un humanisme et du souci de l'avenir de la Nation! Nous n'étions pas habitués à ces élans de générosité de la part du capital ; nonobstant le fait que ce n'est pas à ce dernier que l'on demande de faire des efforts en la matière...

Evidemment dans les données du problème évoqué il n'est jamais question de la réalité du rapport social et il est de notoriété que les classes sociales n'existent pas. Subsiste une simple question de comptabilité. Dans la sphère sereine et pieuse de l'idéologie, l'évidence immédiate est de rigueur, le monde tel qu'il est doit se pérenniser : produire des marchandises et faire toujours plus d'argent. Pourquoi parlerait-on alors des finalités de la vie sociale que les hommes pourraient envisager consciemment sans être dominés aveuglément par l'économie devenue nécessité, seconde nature travestie en fatalité transcendante? Pourquoi travaillons-nous? N'y a-t-il pas d'autre voie possible pour l'humanité que celle de l'aliénation de son existence au travail salarié dont la nature est de permettre la valorisation du capital via le marché mondial au sein duquel circulent d'innombrables marchandises desquelles, par ailleurs, beaucoup de prolétaires ne connaîtront jamais la couleur ni la saveur (paupérisation).

Aussi est-il erroné de discuter de la question des retraites en acceptant les termes par lesquels la classe dominante la formule et la présente médiatiquement. La réalité de celle-ci ne relève pas d'une comptabilité financière et/ou démographique - étant donné le développement des forces productives actuel - mais provient du coeur même du système d'exploitation capitaliste dans sa lutte contre la chute du taux de profit aboutissant à une quête indéfinie d'une masse croissante de profit par tous les moyens (intensification de la productivité, allongement du temps de travail, privatisation des secteurs publics, financiarisation d'un maximum d'opérations d'échange). Le temps de non travail est toujours synonyme d'absence de valorisation pour le capital (le loisir lui-même a été aliéné dans sa nature propre pour être marchandisé).

Que faire alors des chômeurs et des prolétaires retraités? Les premiers sont tout à tour bouches inutiles et armée de réserve dans laquelle il est possible de puiser ponctuellement, permettant ainsi de faire pression sur la masse salariale des actifs (capital variable chez Marx). Quant aux autres, ils commencent à vivre un peu trop longtemps (encore que cela soit très relatif) et pour un système dont le calcul égoïste est le moteur essentiel, ils deviennent carrément surnuméraires. Les luttes ouvrières avaient réussi jusqu'à aujourd'hui à contrecarrer cette tendance (1) mais le capital, étranglé par ses contradictions, se doit de reprendre les hostilités contre le prolétariat et de confisquer les miettes qui lui avaient été concédées antérieurement afin de sauvegarder la "paix sociale". La guerre à outrance que se mènent les diverses bandes du capitalisme à travers le monde globalisé lui dicte cette nécessité.

De ce point de vue la mise en oeuvre par les Etats-Unis, à la fin du mois de septembre, de mesures protectionnistes visant directement la Chine marque le début effectif d'un nouveau cycle conflictuel impérialiste dont on avait déjà perçu les prodromes. Les Etats-Unis feront tout afin de déstabiliser intérieurement le pouvoir chinois, dans un premier temps. L'évolution de la situation dépendra également de la façon dont les contradictions sociales internes à la République Populaire seront abordées au sein de celle-ci. Les luttes sociales y sont nombreuses dorénavant et le prolétariat proteste contre la mainmise du capital avec sa soif d'exploitation dans secteurs de la production. Les rapports de force à l'intérieur du Parti Communiste Chinois devront être examinés de près et il est souhaitable que les voix révolutionnaires s'y fassent entendre tout en reprenant le dessus, notamment lors du prochain congrès du PCC. Avec cette situation conflictuelle entre les deux plus grandes puissances mondiales actuelles, nous sommes à un tournant de l'histoire de l'humanité ; il faut en prendre clairement la mesure.

Les deux sujets évoqués précédemment paraissent être éloignés et étrangers l'un à l'égard de l'autre. Il n'en est rien en réalité. Nous traitons de la même dynamique : la course à l'abîme de la trajectoire du capital avec la multiplications des conflits interimpérialistes plus ou moins ouverts, des coups tordus entre Etats et bandes concurrentes, des dispositions guerrières envers les Etats essayant de sauvegarder un minimum d'indépendance, des mesures imposées d'exploitation intensive de la force de travail disponible du prolétariat et cela en fonction des conditions historiques et géopolitiques propres à chaque aire culturelle.

Bien entendu, la fonction de l'idéologie dominante est de minimiser ces problèmes et d'en brosser un tableau édulcoré comme nous le disions ci-dessus. En Europe, et particulièrement en France, la fonction de l'opposition "démocratique", de "gauche", "républicaine" et autres sornettes est de valider cette mystification idéologique. Ainsi la contestation des dispositions concernant les retraites ne vise pas, pour les partis de gauche, à remettre en question le coeur du système d'exploitation et d'aliénation mais à se remettre en selle pour l'élection présidentielle de 2012 ; jeu dérisoire dont il est souhaitable que le mouvement ouvrier se débarrasse rapidement. Dans l'immédiat la façon, néanmoins, dont celui-ci pourrait déjouer ce piège n'est pas encore directement perceptible.

Depuis quelques semaines plusieurs journées d'actions syndicales s'enchaînent sans résultats, le gouvernement à clairement affirmé qu'il ne reculerait pas et que nous devions nous préparer à une augmentation progressive de l'âge de départ à la retraite.Durant ces vingt dernières années, rien n'est venu véritablement gêner le programme clair des instances mondialistes pour détruire les acquis sociaux conquis par les prolétaires européens au prix de longues luttes.

 

La mobilisation actuelle est loin de donner corps au mythe de la grève générale (2). Il y a plusieurs facteurs à prendre en compte pour expliquer cela. La fin des « bastions ouvriers », les grandes entreprises que les délocalisations et les restructurations ont quasiment tuées, et le développement de petites structures où le droit de grève est uniquement théorique, rendent les mobilisations sociales difficiles. Les directions syndicales majoritaires refusent d'être dépassées par une base potentiellement incontrôlable et de toute manière veulent simplement trouver un accord ménageant leur rôle de partenaires sociaux du capital. Si le refus de la réforme est largement majoritaire dans la population française, il ne débouche pas sur une mobilisation populaire. Au final, on ressort juste les figures de la Gauche pour préparer le futur cirque de la prochaine présidentielle.

La leçon à tirer de tout cela ? Que la simple défense des « acquis sociaux » est vouée à l'échec si elle n'est pas d'abord une offensive pour le socialisme révolutionnaire. Que défiler de manière festive et moutonnière est stupide, qu'il vaut mieux s'organiser et se former sérieusement pour frapper fort. Il est donc nécessaire que les révolutionnaires poursuivent leur travail d'explication en vue de l'approfondissement de la lutte et de l'élévation du niveau de conscience afin que celle-ci s'actualise adéquatement au sein du prolétariat, en tant que conscience de classe.

NOTES:

1) Les luttes du prolétariat sur le terrain économique sont justifiées. C'est un combat contre l'exploitation qu'il ne faut jamais cesser. Néanmoins, elles ne constituent pas une fin en soi; leur intérêt les transcende. Elles permettent d'apprendre à lutter à la base et sont les prémisses d'une éducation politique.

D'autre part, pour le socialisme la question des "retraites" serait autrement envisageable. C'est le travail salarié qui est un bagne, pas l'activité de production et de création qui pourrait être vécue sous des modalités encore inexplorées.

2) Si tant est que la grève générale soit la réalité sur la base de laquelle puisse s'exercer un renversement du système capitaliste. Il est possible d'en douter; les processus historiques sont plus complexes que cela, en particulier les processus révolutionnaires. La grève générale ne peut être qu'un épisode parmi d'autres dans l'offensive révolutionnaire.

 

27/07/2010

Rébellion N° 43 : " L'esprit de révolte"

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Au sommaire du numéro  :

- Editorial : " Le linceul du Vieux Monde".

- Mondialisation : "L'immigration massive, une stratégie du capital".

- Le syndicalisme : Qu'est ce que c'est ? Pourquoi se syndiquer ? pourquoi militer ?

- Le capitalisme n'est pas humainement gérable ... Il faut faut le supprimer !

- Valentine de Saint-Point : le futurisme au féminin.

- Von Salomon : les limites de l'activisme.

- Hugo Pratt : la rébellion de l'Imaginaire.

- Ravachol et la dynamite.

- Le Portugal d'hier et d'aujourd'hui.

Disponible contre 4 euros à notre adresse :

Rébellion c/o RSE BP 62124 31020 TOULOUSE cedex 02.

 

 

03/05/2010

Où en sommes-nous ? A l'assaut de l'Avenir !

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Après une année militante particulièrement chargée (avec le développement et l'amélioration de la qualité du journal, le lancement d'une structure militante et la sortie d'un livre manifeste) il était important de faire un bilan pour nos lecteurs. La question est de savoir ce qui légitime encore notre existence indépendante en tant que revue politique et embryon d'organisation politique ? Quelle forme doit prendre notre engagement ?

Depuis 2003, et la fondation de la revue, nous avons accumulé une certaine expérience qui nous permet de juger avec un certain recul l'évolution des mouvances radicales actuelles. Nous nous sommes confrontés à la réalité politique, pas derrière un clavier d'ordinateur mais sur le terrain militant. Cela, loin de nous décourager, a renforcé notre conviction que seul l'engagement collectif pouvait amener un début de solution à la crise du mouvement révolutionnaire.

Nous souhaitons adresser un salut fraternel à tous les camarades qui suivent notre modeste journal, parfois depuis les débuts. A chaque réception d'un courrier d'encouragement ou rencontre d'un de nos lecteurs, nous avons le sentiment de nous rendre utiles à une cause commune.

 

Rébellion, une indispensable prise de conscience

Nous ne nous retrouvons guère dans les solutions proposées par nombre de partis ou d'associations politiques. Dès l'origine, nous avons considéré que la revue Rébellion devait constituer un noyau de résistance et d'expression autonome envers tous les courants maintenant ses adhérents/sympathisants dans les pièges du système et de ses multiples ressources de manipulation/désorientation.

C'est une nécessité vitale pour nous de faire connaître nos idées le plus largement possible. Dès le début, la fonction du journal était d'être un embryon d'organisation. Nous avions la conviction, que nous conservons, que cette organisation ne pouvait se construire sur du vide, que des fondations solides étaient nécessaires.

La revue fut le cadre de la poursuite d'un intense travail théorique pour donner un contenu à notre vision du Socialisme Révolutionnaire Européen. « Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire » écrivait Lénine. Nous nous sommes attelés à définir nos positions de manière solide, mais nous avons conscience qu'il est maintenant important de revenir de manière régulière sur certains points pour les éclaircir et les rendre accessibles à tous. Mais cela implique que nos lecteurs ne restent pas passifs, un travail de formation politique est indispensable. La lecture et l'étude des textes d'analyse du mouvement révolutionnaire sont indispensables pour forger les esprits.

Pour nous, le travail théorique permet de rendre aux événements tout leur sens, d'expliquer la marche du monde et de déjouer les piéges de la désinformation. Rébellion alimente l'esprit critique de ses lecteurs, donne une orientation claire au combat SRE et participe à la construction d'une organisation révolutionnaire efficace.

Les cercles Rébellion et l'OSRE : s'organiser oui ! Mais pourquoi ?

L'activité militante SRE eut pour premier cadre les cercles Rébellion. Cette structure s'occupe en priorité de la diffusion de la revue et sert de cadre de regroupement local à nos adhérents, lecteurs ou sympathisants. En Mai 2009, la création de l'OSRE a eu la fonction de proposer un cadre cohérent à ceux désirant s'engager un peu plus.

La question de l'organisation a toujours été un enjeu crucial dans l'histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire. Afin de répondre aux exigences du combat pour l'alternative à la société capitaliste, les travailleurs durent mettre en place des structures  pour défendre leur cause. Face à la répression et comme réponse concrète aux aspirations de changement des classes populaires, ils surent bâtir des organisations efficaces, qui ne laissaient pas la place à l'amateurisme.

Nous constatons que la plupart de nos jeunes lecteurs, s'ils sont souvent "idéalistes", manquent totalement d'expérience militante. Nous devons donc transmettre cela et participer à la formation de cette jeune génération.

L'esprit militant SRE

L'engagement militant est pour nous un devoir volontairement accepté. Servir un idéal implique d'être exigeant avec soi-même. Le dépassement de l'individualisme moderne passe par l'affirmation d' une volonté révolutionnaire. Nous insistons souvent sur "l'impersonnalité de l'action", c'est-à-dire que l'action et la pensée relèvent d'un niveau collectif plus fort que les ego de chacun .

Cette vison n'est nullement sectaire ou élitiste. L'organisation est tout à la fois vivante ( car enrichie par la diversité des positions, des expériences et des discussions entre camarades) et unie dans l'action (chacun devant suivre les décisions collectives une fois fixées). En ne laissant jamais la place à la confusion ou au dilettantisme, nous affirmons que chaque militant est responsable de la progression des idées SRE devant l'Histoire.

Un engagement sérieux implique de la constance, de la passion, du courage, des sacrifices, de l'audace, un sens de la décision dans les moments cruciaux... Tout cela, le SRE le porte en lui. Mais plus fort que tout, le courage de ne jamais reculer est le ciment de notre communauté militante.

 

3 objectifs clairs pour les mois à venir : Education, Agitation, Organisation.

Nous demandons à l'ensemble de nos militants, lecteurs et sympathisants de nous aider à faire progresser de manière décisive notre organisation. Chacun à son niveau et selon ses moyens, nous devons parvenir à :

1er - Augmenter la diffusion de la revue Rébellion de manière significative. Cela passe prioriatirement par l'augmenation des abonnements, pour cela faîtes connaitre massivement notre revue autour de vous (à vos camarades, à vos collégues, à votre liste de contacts mails, dans vos publications ou sites internet, en écrivant aux journaux que vous lisez pour présenter notre revue). Nous recherchons activement de bonnes volontés pour assurer la diffusion miltante en librairie et dans les cercles militants.

2er - Implanter les cercles Rébellion et l'OSRE. Il faut inonder votre région, votre quartier ou université sous le matériel militant SRE (tracts, affiches, autocollants). Organisez des rencontres de présentation de la revue et mettez en place un réseau d'associations proche de notre organisation dans le maximun de villes.

 

 

18/04/2010

Principes d'actions SRE

Le Socialisme Révolutionnaire Européen est à la fois un projet alternatif de société et une démarche pratique pour y parvenir. Nous voulons réaliser une révolution radicale et globale, à la fois économique, sociale et culturelle, afin que soient détruites l'exploitation, l'injustice et l'ignorance.

Les changements radicaux que nous souhaitons n'arriveront qu'après l'abolition de la dictature du Capitalisme. Celle-ci façonne dans son stade actuel de développement l'ensemble des secteurs de la société. La mondialisation des marchés, la globalisation économique et la diffusion d'un modèle culturel unique sont les conséquences d'une logique d'expansion et de domination d'un système que nous rejetons dans son ensemble. Nous voulons libérer la société de l'emprise des impératifs de production et de consommation et les remplacer par une approche nouvelle de la vie, qui ne serait plus une course effrénée aux profits et aux bonheurs artificiels.

La nécessité de la construction d'une organisation politique structurée et conséquente apparaît comme fondamentale, nous faisons du lien entre pratique et théorie.  Cela est une priorité et un principe de base de notre engagement militant.  Pour développer une réelle action politique, avec une certaine cohérence, il est nécessaire d'avoir une organisation formelle, stable et durable.

Pour cela nous pensons qu'il est important de mettre en place des groupes locaux, les cercles Rébellion. Espace de formation physique et intellectuelle, ils fonctionnent selon une autodiscipline acceptée par tous et exempte de querelles petites bourgeoises de personnes. La formation des militants par la mise en place de cercles de formation réguliers et d'écoles populaires reprend la tradition ouvrière et révolutionnaire, permettant d'éviter la dérive et les erreurs passées. Cette organisation ne doit pas se perdre dans l'intellectualisme mondain et fournira des points de repère sur l'histoire et la doctrine SRE.

 

 

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17/04/2010

Réinventons la patrie ! (2)

Patrie et Socialisme

La Patrie à réinventer. Le Devenir du Socialisme

 

Article publié dans le numéro 39 de Rébellion Novembre/Décembre 2009

Deuxième partie de nos positions du dossier sur les régions, la Nation et l’Europe

 

 

 

Nous poursuivons ici l’analyse débutée dans le numéro 38 de Rébellion sur la question nationale. Au moment où le gouvernement de Nicolas Sarkozy entreprend une nouvelle campagne médiatique bidon autour de l’ « Identité Nationale », probablement pour faire oublier les dernières affaires révélatrices de son niveau de corruption et la faillite du « sarkozisme » face à la dure réalité d’un monde en crise, il nous paraît utile de réaffirmer certains principes fondamentaux et de présenter une alternative à ces écrans de fumée.

 

La Nation aux travailleurs !

Une rupture radicale doit être clairement faite, aussi bien, avec les conceptions réactionnaires et bourgeoises de l’idée nationale qu’avec les tenants d’une mondialisation « post nationale » (qu’ils soient des représentants des multinationales, des bobos altermondialistes ou les derniers rejetons des groupuscules gauchistes). L’enjeu est de faire le lien entre la question nationale et la question sociale, c'est-à-dire de poser clairement la priorité de la libération de la France et de l’Europe de la domination capitaliste, ce qui aurait par voie de conséquence une portée internationale essentielle.

Dans le cas français, le cadre national est riche en perspectives novatrices et révolutionnaires que nous ne devons pas laisser corrompre ou dénigrer par les discours démagogiques et les illusions de ses récupérateurs ou opposants. Historiquement porteuse d’un esprit frondeur et rebelle, la France est née de l’idée que toute injustice devait obligatoirement donner naissance à une résistance capable de la vaincre. Que la liberté de la Nation et de son Peuple ne pouvait être divisée, que la communauté nationale offrait à l’individu un cadre pour son épanouissement en lui garantissant la solidarité de l’ensemble de ses concitoyens. « Un grand peuple ne vit pas de son passé, comme un rentier de ses rentes » comme l’écrivait Bernanos, il nous appartient de redonner son sens à ses anciennes notions de justice, de liberté et de souveraineté populaire. L’oligarchie qui nous dirige ayant renié la Nation, les travailleurs doivent la réinventer et en faire tout autre chose.

 

C’est dans cette optique que nous mettons en exergue l’idée de Nation des travailleurs, signifiant avant toute chose le renversement du rapport de force entre le capital et le prolétariat (immense majorité de la population). La domination réelle du capital bien qu’ayant fait diminué en quantité relative la classe ouvrière traditionnelle (délocalisation et chômage de larges secteurs industriels) n’en a pas moins plongé la majorité des travailleurs et des chômeurs dans une situation de prolétarisation, c’est-à-dire de précarité grandissante du point de vue de leurs conditions d’existence la plus élémentaire. Face à cette attaque de grande envergure déclenchée par le capital (lutte de classe), la réponse adéquate ne passe pas par trente six mille chemins. Les illusions réformistes ont fait long feu. Il n’y a qu’une seule solution, celle de renverser le rapport de force, non pas simplement de manière ponctuelle en essayant, même si cela est légitime, de compenser les pertes « économiques » de niveau de vie mais en tentant d’établir une hégémonie politique en faveur du plus grand nombre : le prolétariat, et cela afin que ce dernier dépasse sa condition.

Le cadre national est l’instrument adéquat au sein duquel le prolétariat peut redonner sens à sa vie sans être atomisé dans une néo barbarie sociale, qui serait son seul horizon possible avec le maintien du système en place. Qu’on le veuille ou non, l’Etat républicain offre encore l’opportunité d’exercer la puissance souveraine et de choisir les grandes orientations comme celles de sortir de l’OTAN, du carcan d’impotence de l’UE en proposant aux autres peuples européens une voie autonome de destin, par exemple. De même sur le plan intérieur, il s’agit de combattre ce qui peut malheureusement apparaître comme une « fatalité » économique, la condition au plus haut point précaire et soumise à la contingence la plus arbitraire, imposée aux classes populaires par le capital.

 

La socialisation des conditions de production et de distribution n’a pas uniquement une portée économique. Sa signification l’outrepasse. Il s’agit de renverser les finalités de l’être social qui sont actuellement aliénées au productivisme et au consumérisme par le processus d’instrumentalisation/manipulation des consciences. Sans se faire d’illusions sur la nature humaine, nous pouvons raisonnablement soutenir la thèse selon laquelle le capital dans sa domination réelle (soumission du rapport social à l’économie productiviste) entrave toute créativité humaine chez la plupart des hommes. Le socialisme prend alors le sens de participation consciente de chacun aux décisions le concernant sur le plan social. C’est notre réponse à la question de l’identité nationale qui ne se situe pas dans une essence intemporelle mais dans un effort constructif et qualitatif de la part d’un peuple prenant ses destinées en mains, y compris dans le contexte international de la lutte de classe et de la lutte pour une vision culturelle d’ensemble (monde multipolaire dans lequel l’Europe a son mot à dire).

En France, la conscience nationale fut toujours naturellement liée à une conscience socialiste et révolutionnaire forte dans le mouvement ouvrier. Elle connaît aujourd’hui un regain d’intérêt causé par le fait que toutes les attaques dont sont victimes les travailleurs français viennent de la logique d’un capitalisme mondialisé. Pour cela, la Nation peut servir de base à la création d’un rapport de force politique favorable car elle est encore un frein à l’extension de la globalisation et un lieu d’expression pour la solidarité. Elle est un levier pour faire basculer le Peuple dans le combat pour sa libération nationale et sociale.

 

Le rôle de la Nation dans la construction du socialisme

Car le débat sur la question nationale nous ramène à celui du choix de société dans laquelle nous voulons vivre. Pour nous, qui combattons pour le socialisme, nous ne voulons pas nous libérer de l’oppression du capitalisme mondialiste, pour retomber sous le joug d’un capitalisme « national ».

Dans un premier temps, la (re)nationalisation totale des secteurs clés économiques et des services publics doit permettre de remettre au service du peuple, l’outil économique. Le retour dans le cadre national de larges pans de la production et de la distribution économique s’accompagne d’une socialisation progressive de la Nation. Ainsi les conseils d’entreprise seront amenés à diriger l’activité de ces nouvelles structures. Cela passe par une redéfinition des besoins et des moyens de les satisfaire par une praxis sociale non aliénante. La dimension de la coopération des producteurs doit être l’axe central de cette nouvelle praxis, celle qui justement ne les réduirait pas à être de simples agents économiques.

Cela a, par exemple, de vastes répercussions sur le rôle de la formation, de l’éducation qui doit fournir aux travailleurs les outils leur permettant d’intervenir « théoriquement » dans le cadre de leur activité (cf. les analyses de Marx lorsqu’il explique que le travail devient de plus en plus « théorique »).

 

A partir de là, il ne faut plus considérer la technique sous son seul aspect de l’arraisonnement du monde mais comme pratique dialectisée par l’enrichissement du lien social. C’est la réponse au débat biaisé sur la croissance /décroissance. La liberté est toujours au-delà de la nécessité, en conséquence il n’y a un destin de la domination technique productiviste à croissance exponentielle que parce que la téléologie propre à l’être social est sous l’emprise de la domination réelle du capital. Dit autrement, le travail n’est pas que du travail ! Il peut apparaître comme lien social non aliéné s’il débouche sur autre chose que sur la seule préoccupation de la nécessité économique.

Ontologiquement, il est moyen de produire et de reproduire ses conditions d’existence au sens large, en d’autres termes il ne permet pas seulement de vivre mais de « bien vivre », c’est-à-dire non dans l’illimité de la quête marchande et financière mais dans l’ouverture à sa signification communautaire et à la réalisation personnelle des individualités.

Concrètement, un système de production et de distribution socialiste prendra en compte d’autres critères que la recherche du profit. On peut imaginer sans mal que les conditions de travail, la recherche de la qualité des produits, la valorisation de la production décentralisée et locale, le respect des équilibres naturels, seront des objectifs tout à fait réalisables pour ce nouveau rapport social.

Cela le capital l’interdit à jamais. L’idée utopique qu’il existerait un « bon capitalisme populaire », basée sur les entrepreneurs de PME familiales à la démarche paternaliste et d’honnêtes petits actionnaires, est un doux rêve qui ne résiste pas aux faits. S’il est évident que nombreux d’entre eux souffrent des retombées de la mondialisation et des dérèglements de l’économie, et qu’ils glissent progressivement vers les couches populaires du fait de leur paupérisation, ils n’en peuvent pas pour autant donner la direction aux luttes de l’ensemble des travailleurs (trop attachés à la croyance en l’éternisation d’un « bon » capitalisme). Ils doivent prendre conscience que la socialisation progressive des rapports de production est la seule solution pour sortir de leur impasse actuelle, la collectivisation de vastes secteurs de l’économie (au sens défini ci-dessus) pouvant même représenter pour eux une amélioration de leurs conditions de vie.

 

Communautés locales et régions : un rôle crucial dans la socialisation

Au cœur de notre réflexion et de notre action, l’idée de la socialisation est à nos yeux la seule solution pour que chacun s’habitue à prendre une part active et consciente au travail qui a toujours une portée collective et cesse d’être instrument ou spectateur passif de la domination capitaliste. La socialisation doit s’appuyer sur des bases « saines » (c’est-à-dire non mercantiles et liées à l’idée de solidarité et d’un minimum de décence morale commune, la « common decency » d’Orwell) que représentent les rapports humains authentiques existant encore dans nos sociétés. Pour cela, les communautés locales constituées par des communes populaires auront un rôle important à jouer. Nous serons amenés à développer dans un futur article cette idée mais nous pouvons d’ores et déjà la définir comme étant une unité politique et territoriale assez proche de l’esprit des premiers soviets de la Révolution Russe ou du fédéralisme avancé par la Commune de Paris.

 

Partisan de la subsidiarité, nous pensons qu’une articulation est possible entre les divers niveaux de compétence. Il s’agit évidemment du fameux principe de subsidiarité évoqué par les instances de l’UE mais qui pour cette dernière est un peu comme l’Arlésienne que l’on attend toujours… Cela n’est d’ailleurs pas si étonnant que cela car ce principe se situe aux antipodes du fonctionnement de la société capitaliste, de ses nécessités fondamentales. La subsidiarité consiste si l’on veut le dire le plus simplement du monde à s’occuper de ce qui nous regarde ! Justement, la démocratie représentative si chère au capital contemporain consiste à nous faire croire que l’on s’occupe, grâce à elle, de ce qui nous regarde. Le citoyen y est invité à participer à sa propre mystification et à s’identifier aux décisions inhérentes au fonctionnement optimal du capital dans sa quête illimitée du profit. Restent alors quelques miettes de pouvoir et de prébendes concédées à ceux qui veulent bien entrer dans le jeu de la politique du système.

 

Il est étrange que l’on ait peu insisté sur la compatibilité du socialisme et de la subsidiarité. Le premier ne peut vraiment se concrétiser et répondre aux attentes des citoyens que par le moyen de leur large participation à l’élaboration des orientations les concernant le plus immédiatement, c’est-à-dire sur le plan local plus ou moins proche selon les circonstances. Quant au second, si l’on ne veut pas seulement l’envisager comme une simple figure de style, il ne peut gagner en contenu que dans la mesure où il pourrait donner forme aux aspirations les plus communautaires et non à l’imposition d’intérêts particuliers à la majorité.

C’est en ce sens, la concrétisation des termes du Contrat Social évoqué par Rousseau, qui a été trop souvent mal compris. Qu’ « il n’y ait pas de sociétés particulières dans l’Etat » écrit le philosophe. On croit devoir lire cette affirmation comme étant un plaidoyer pour la centralisation artificielle à tout prix. C’est à notre avis un contresens puisque l’auteur précise que s’il doit en exister (réalisme !) il faut alors favoriser leur multiplication ! Comment alors les articuler si l’on veut qu’en résulte la « volonté générale » (qui n’a rien d’abstraite !).

Réponse : par la subsidiarité, c’est-à-dire par l’espace public se dégageant de la discussion concernant ce qui semble être le plus pertinent pour telle ou telle instance communautaire existant à telle ou telle échelle ; les communautés plus larges (au sens d’instances de décisions à portée plus large comme la région par rapport à la commune et ainsi de suite) englobant celles du stade inférieur non pour les phagocyter mais pour leur donner les moyens d’exister dans un monde complexe (par exemple, questions de sécurité nationale, approvisionnements divers, etc.).

 

Sans entrer dans une description de notre futur qui serait utopique, qui ne perçoit qu’un tel fonctionnement porte en lui l’empreinte de la socialisation de nombreux facteurs de notre activité, de notre existence sociale ? Les nouvelles réalisations que le Socialisme apportera ainsi, laissent entrevoir un vaste champ du possible pour faire revivre les collectivités et communautés locales. L’attachement à des cultures enracinées ne sera nullement incompatible avec la participation à cette transformation radicale de la société. Elles trouveront leur place naturellement dans cette nouvelle organisation.

Mais nous devons préciser qu’une relative centralisation sera toujours nécessaire. Si la relocalisation de l’économie veut être efficace, elle doit être coordonnée au niveau de la France et de l’Europe par une planification intelligente dans le domaine de la production et de la distribution. Nous ne pouvons que souscrire à l’analyse d’un collectif issu du PCF sur la question de la centralisation: « Elle constitue la meilleure garantie dans l’élévation de la productivité, dans la lutte contre les gaspillages, dans la diminution de la bureaucratie. De plus, c’est elle qui assure un développement homogène de la communauté nationale sur l’ensemble du territoire. (…) La première des libertés locales reste la liberté de pouvoir atteindre un niveau de développement identique aux autres collectivités. (…) Un contre-exemple remarquable à l’efficacité de ces politiques peut être celui de l’Espagne où peuvent se côtoyer une Catalogne richissime et un Sud du pays en quasi sous-développement. L’homogénéité des niveaux de vie à l’intérieur du pays ne peut donc se faire que par une répartition des richesses par l’action de l’État central. En revanche, il convient que l’élaboration des politiques mises en œuvre par la nation soit un projet concerté, associant les citoyens de base, par l’intermédiaire de structures locales, aux pouvoirs importants, qui soit le fondement de la démocratie dans le pays. De même, il est impératif que la mise en place réelle des politiques de développement se fasse, sur le terrain, par des organismes responsables et révocables par les citoyens en cas d’incompétence, de mauvaise volonté ou de procédés douteux [1] ».

 

La crise économique et financière actuelle laisse entrevoir la possibilité de sortir du capitalisme. Il est nécessaire de décoloniser notre imaginaire de la marchandise, selon la formule de Serge Latouche (de son existence sensible/suprasensible, ajouterons-nous avec Marx), et de proposer une alternative viable au système capitaliste. Cette alternative ne saurait prendre la forme d’un inenvisageable retour à un mirifique âge d’or et ne sera en aucun cas unique, mais conforme au génie propre de chaque culture. Elle devra nécessairement tenir compte de la finitude de la Terre et de ses productions naturelles et sera donc libérée du tropisme du consumérisme. L’Europe, et plus généralement les pays du Nord, devront repenser intégralement leur système de production et de consommation pour le rendre compatible avec les limites des ressources naturelles. La théorie de la décroissance signifiant pour nous la fin de l’accumulation capitaliste, fin inhérente au socialisme, pourrait être le paradigme permettant de concilier le caractère prométhéen de la civilisation européenne (non réductible à l’économisme) et la réduction de notre empreinte écologique. Elle préconise entre autres choses de relocaliser la production des biens et des services, et par voie de conséquence, les emplois. Elle est en ce sens un frein à la mondialisation car elle conduit au réenracinement en s’opposant à la logique de la nomadisation. Elle s’articule logiquement avec une conception subsidiariste de la société dans le cadre d’une Europe réellement fédérale que nous appelons de nos vœux<.

 

NOTE

1>Collectif, « L’idéologie Européenne », Editions Adem, 2008.

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